jeudi 29 août 2013

La mémoire double (Igor & Grichka Bogdanov)

Les frères Bogdanov qui écrivent un roman de science-fiction, ça m'intéresse grandement ! J'aime beaucoup la façon qu'ils ont de présenter et simplifier les choses. Les entendre dans une émission, c'est souvent très intéressant en plus d'être clair. J'ai acheté ce livre les yeux fermés et je me suis mis à le lire rapidement, le finissant en moins de deux jours au final. J'avoue que j'ai été très dérouté par le propos du récit, qui est au final très désorientant. Sans le nom des frères Bogdanov sur la couverture, on aurait pu croire que le livre avait été écrit par d'autres. Pourquoi ? Je vais vous l'expliquer :


Résumé en trois mots : Informatique, Guerre froide et Sécurité

Le livre présent la petite histoire d'un simple paysan, nommé Antoine, qui travaille depuis 30 ans dans la même ferme d'un patelin paumé dans ... je crois que c'est la Gasconne. Ce brave paysan de 37 ans vit sa vie tranquille, sans jamais être sorti de sa ferme natale, où il est rentré alors qu'il avait seulement 7 ans. Et voila que des gens viennent l'embêter. Ils recherchent son numéro de sécurité sociale, qui est manquant. Son absence oblige des policiers et des inspecteurs en noir. Mais Antoine a un souci : il ne se rappelle pas de ce numéro, et surtout, il commence à avoir des hallucinations, comme si son monde s'altérait, comme si la réalité était fausse.

Dit comme ça, je pense que vous voyez un peu de quoi il va s'agir. Une préface des frères explique qu'ils ont eu l'impression qu'un film bien connu (Matrix) aurait eu vent de cet ouvrage. Je dirais qu'on sent aussi un peu de Total Recall dedans, mais juste un petit peu. Et c'est vrai qu'on trouve pas mal de ce qu'il y a dans Matrix, mais par contre c'est très curieux. Le livre date d'avant le film. Enfin, on ne parlera pas de plagiat ou de quoi que ce soit ici, je ne peux que faire des suppositions (et visiblement les frangins le font aussi).

En fait, l'histoire est très surprenant pour un livre de science-fiction. Ici les 3/4 du roman se concentrent dans la campagne perdu, dans les travaux des champs et le comportement des uns envers les autres dans ce qu'on appelle le milieu rurale profond. On sent que les auteurs se sont impliqués dans ces vieux paysans qui sont proches de leur terres et de leur récolte. C'est une sacrée publicité pour les paysans d'autrefois, dans le genre ça m'a rappelé un autre livre (Les sentiers du vieux Cause qui vante dans le même genre. Très long à lire). Du coup d'ailleurs, on attend beaucoup la suite. Le rythme est très lent et la mise en route est longue. Les éléments qui font avancer l'intrigue sont disséminés de façon minuscule entre deux passages très long dans les champs, l'étable et les relations de personnages. En fait, on dirait presque une chronique paysanne dans laquelle débarque des extra-terrestre (il n'y a pas d'extra-terrestre, c'est pour l'image).

Du coup, j'avoue que j'ai été déçu par le livre, qui est certes sympathique, mais surtout très lent. L'ensemble contient des bonnes idées, mais la représentation des campagnes qui a été faite est plutôt longue et dans l'ensemble ne m'a pas du tout passionné (j'ai beau être né en campagne, je n'ai pas été touché par ce son de cloche). Il en a résulté une frustration dans ma lecture, et j'ai eu un soupir de soulagement lorsque enfin on atteignait l'action (qui est très limitée). Et finalement la fin m'a déçu également, trop convenue et trop simple j'ai trouvé.

En fait, je suis sur que c'est parce que j'ai trouvé l'ensemble trop simple que j'ai ce sentiment de déception. On est loin de la science-fiction à la Asimov, loin des étoiles ou des dérives de la société. C'est une chronique paysanne teintée de science-fiction plutôt, et j'avoue que j'ai moins aimé du coup.
Cependant je laisse les qualités à l'ouvrage : il est très agréable à lire (et très simple, en comparaison du Asimov que je lis actuellement) et surtout propose des bonnes idées qu'on connait de nos jours grâce à Matrix. L'ensemble dégage un charme auquel je n'ai pas du tout été sensible, mais qui peut être bien efficace sur certains. Si vous aimez l'ambiance vieille campagne et que vous vous intéressez à la science-fiction, je vous le recommande. Sinon, passez allègrement votre chemin, il y a mieux dans le genre.

(Chronique n°61)

jeudi 15 août 2013

Le seigneur des porcheries (Tristan Egolf)


Ce livre là, je suis tombé dessus complètement par hasard. Je cherchais le livre La conjuration des imbéciles (que je vais m'empresser de chroniquer bientôt), et je suis tombé dessus. J'ai lu le résumé et je me suis demandé ce que c'était comme genre de livre. J'ai décidé de le prendre et je l'ai lu. Quand je l'ai fini je me demandais encore ce que c'était que ce livre, et je vais tenter de vous expliquer pourquoi. En tout cas c'est vraiment très étrange. Voici donc Le seigneur des porcheries, de Tristan Egolf.


Résumé en trois mots : Humour, USA et noir

Je dois dire que le début fut difficile, on ne comprend pas du tout où l'auteur veut nous emmener. D'ailleurs, tiens, en parlant de l'auteur, son histoire vaut le détour (je vous laisse chercher sur Internet, c'est assez amusant comme histoire). Pour info, elle est comparable à celle d'un John Kennedy Toole (sur le fond au moins), mais j'en reparle dans la prochaine chronique.

Donc, je veux juste vous signaler que l'auteur a publié son premier manuscrit en France (Cocorico !!!) après 70 refus dans les maisons d'éditions (faut quand même s'accrocher). Cet auteur est était d'ailleurs passablement dépressif, au point de finir par se suicider. Cela dit, j'ai d'abord lu le livre et du coup, franchement, ça ne m'étonne pas du tout. Je vais m'expliquer.
Alors, pour ne pas trop vous gâcher la surprise je vais vous laisser lire, mais je dois juste dire qu'il y aura un siège d'une ferme et une crise énorme dans la ville. La crise, c'est la partie finale, mais dans le genre d'une crise, je suis sur que vous ne pouvez pas imaginer. Sinon, je peux dire que le style d'écriture est vraiment très curieux, avec beaucoup de métaphores; d'expressions imagées, de jeux de mots, de tournures humoristiques et de phrases drôles.
Je dois admettre que je tire mon chapeau au traducteur (je pense qu'il y a eu des arrangements lorsqu'il était en France pour la traduction) car le style est vraiment plaisant à lire et je  me suis amusé du début à la fin. Surtout vers la fin où j'étais plié en rire quasiment à chaque page. On en redemanderai presque.


Sinon le reste est bon aussi, l'histoire prenant des détours inattendus bien que l'on sache d'avance la fin, et j'ai eu de belles surprises auxquelles je ne m'attendais pas du tout. La montée se fait crescendo, d'abord dans une première partie finissant par la ferme, puis dans la deuxième avec une explosion finale épique d'une situation catastrophique. C'est excellent dans la construction et l'humour cimente le tout en le rendant parfaitement lisible.

Ce livre est vraiment très bon, drôle et bien écrit, et se targuant en sus de nous démontrer ce qu'il peut y avoir de pire chez nous (enfin, dans le sud des USA notamment, mais je trouve qu'il y a quelques échos par chez nous ...). C'est une superbe plongée dans l'âme humaine avec un anti-héros qu'on adore et qui nous amusera jusqu'au bout. Dans le genre des vies de merde, il tient bien la route, et je ne peux que vous recommander cette lecture intéressante et drôle.

(Chronique n°60)

vendredi 9 août 2013

Tout est sous contrôle (Hugh Laurie)


Je n'aime pas du tout lorsqu'on vante un livre pour son auteur qui est réputé, bien des grands se sont cassés la gueule sur des livres (j'ai des exemples précis en tête mais je ne citerais pas par décence) et bien des stars ont pondu des œuvres minables qui n'auraient jamais dû être publiées. Et pourtant, parfois certains sortent vraiment du lot et proposent quelque chose de génial, bien écrit, bien construit. Le genre de choses qui n'arrive que très rarement, et souvent lorsque l'auteur a avant tout envie d'écrire un livre pour raconter une histoire et non se mettre en avant en sortant quelque chose (ce genre de considération marche d'autant mieux pour les BD où nous goutons au plaisir sadique de grands noms qui reprennent des BD et en font des catastrophes sans nom). C'est un roman de ce style donc que je vais aujourd'hui commenter, une belle œuvre qui mérite qu'on s'y attarde, à l'opposé de ce qu'on pourrait attendre. C'est Tout est sous contrôle de Hugh Laurie.


Résumé en trois mots : Privé, Armement et Ennuies
 
Alors, pour ce livre ça va être un poil compliqué à expliquer. L'auteur est bel et bien Hugh Laurie, l'interprète du Dr House dans la série éponyme, mais le livre date de 1996. Il est sorti en France en 2009 uniquement, lorsque la popularité de l'auteur et de la série permirent un petit affichage dans les boutiques. Lorsque Hugh Laurie écrit le livre, il n'est pas extrêmement populaire encore, et écrit d'ailleurs sous un pseudonyme lorsqu'il l'envoie à l'éditeur, afin de ne pas l'influencer par son prestige d'acteur et l'inciter à le prendre. Comme quoi, des acteurs peuvent avoir de la morale. Enfin bref, je m'égare.
En tout cas, il faut savoir que le roman fut écrit avant que la série du Dr House ne commence (c'est en 2002 seulement qu'elle fut écrite), alors qu'on aurait volontiers dit l'inverse. Je vais m'expliquer.

Le roman est un mélange de policier, d'humour et d'espionnage. Bien mélangé. Déjà, l'humour est présent absolument partout, sans temps mort. Un humour cynique, très noir également, dans le genre exact que ferait le Dr House dans la série. Je ne la connais pas bien, mais de ce que j'ai vu dans les épisodes, je peux vous dire que c'est exactement le même genre d'humour. Là le gros avantage c'est que l'humour est présent absolument dans toutes les pages, ce qui fait que la lecture vous laisse toujours un sourire et vous arrache souvent un rire. C'est plus dans les répliques percutantes et la tournure des phrases que cet humour frappe, mais il est d'une efficacité redoutable.

Le synopsis est le suivant. Un homme d'environ 35 ans, Thomas Lang, est appelé pour commettre un meurtre. Lui qui est plus dans le privé refuse, et prévient la future victime. Bien évidemment, les ennuis commencent, d'autant qu'il trouve chez la future victime quelqu'un qui l'agresse. Et tout s'enchaine ensuite sans temps mort.
Disons le tout net, ce roman c'est du genre action à gogo et parfois actions un poil improbable. Il faut admettre que c'est toujours très bien tournée et sans coup à la James Bond (comprenez par là qu'il n'y a pas de coup gros comme une maison). Ensuite, les actions sont toujours très bien décrites, fluides et dynamique. En plus, l'humour dans le roman fait passer le tout comme une lettre à la poste. Les chutes de chapitres sont très bonnes également, laissant du suspens et quasiment tout le temps humoristique. C'est une façon d'écrire qui est vraiment intéressante et prenante. Autant qu'un bon Stephen King.

En sus de tout cela, nous avons le droit à un fond qui est extra : l'histoire va se développer autour du marché des armes à feu, du terrorisme et d'opérations pour répandre la peur, autorisant ainsi des politiques répressives. Je dois dire que le tout est suffisamment bien tourné pour qu'on ai l'impression d'être entouré de salaud tout au long de notre vie. Et d'ailleurs, il faut admettre que le coup est bien précis, visant la politique d'un état qui se justifie par un acte terroriste qui est lui même commandé par ce même état. Un film était prévu, mais il s'est arrêté après les attentats du onze septembre. N'y cherchez aucun lien de cause à effet, c'est un pur hasard sans doute. Mais je m'égare encore.

En dernier point, je dois avouer que les personnages sont attachant, dans tout le roman, et Thomas Lang est juste parfaite en anti-héros, avec son caractère de cochon, sa tendance aux excès d'alcool et de vitesse, ses petits défauts etc ... En fait, il en devient un héros qu'on apprécie, mais qu'on admire pas. C'est en parfaite adéquation avec le héros.

Pour moi, Hugh Laurie à parfaitement bien visé dans l'écriture de son roman, avec une idée excellente, un humour caustique mais qui colle à merveille avec l'histoire, une sacrée dénonciation des industrie d'armement et en général des gouvernements par la terreur (entre autre des terroristes), ainsi que plein d'autres petites choses. Le style d'écriture est vraiment extra et la lecture est parfaitement fluide. On en redemanderait à la fin, mais il n'y aura manifestement pas de suite, malgré des fausses annonces dans plusieurs plate-forme. En bref, ce livre est superbement bien écrit, et génial dans le fond et la forme. C'est à lire, j'en suis sur, sauf si vous êtes imperméable à ce style d'humour. Comment le savoir ? Lisez-le, vous verrez bien !

(Chronique n°59)