samedi 7 février 2015

Dune (Frank Herbert)

Enfin je lis ce monument de la littérature de science-fiction. Enfin je sais ce que ça veut dire Fremen, distille ou encore Harkonnen. Enfin je peux mettre une histoire sur la fabuleuse bande-originale du groupe Toto, enfin je découvre les noms que j'ai déjà entendu ou évoqué moi-même sans avoir jamais lu. C'est impressionnant comme cette série est devenue culte au fil du temps, investissant différents support (pour ce qui est du cinéma, je vous laisse visionner l'excellente chronique du Fossoyeur de films) et restant dans l'esprit comme une saga imposante qui a proposé un univers unique dans le monde de la science-fiction. Après avoir lu L'étoile et le fouet je percevais un talent assez énorme derrière l'auteur, même si sa littérature me semblait quelque peu inaccessible sur certains points. Je voulais donc m'assurer que Dune était bien ce qu'on me promettait, et que je ne m'étais pas trompé sur l'auteur. C'est maintenant chose faite, j'ai mon propre avis.


Résumé en trois mots : Désert, Politique et Religion

Wouh, je ressors tout juste de ce pavé et je reste soufflé par la tempête de sable qu'elle procure. C'est incroyable comme genre d'oeuvre, à la fois riche et dense, complexe et complète, mais en même temps lisible et prenante. Un véritable chef-d'oeuvre ? Presque, a vraiment peu de choses près.

Premièrement, oui, Frank Herbert est véritablement un génie. Sa façon de façon de faire est magnifique, puisque contrairement à beaucoup de livres qui prennent le temps d'installer les choses et de nous présenter le monde, Frank Herbert nous catapulte dedans sans la moindre indication sur l'organisation sociale et politique de l'univers (oui, parce que tant qu'a faire, autant ne pas se limiter à une seule planète, hein ?) mais sais distiller dans son histoire les informations capitales quand il y en a besoin et ne prend pas son lecteur pour un con en le laissant extraire les informations qu'il faut quand il les lit. Tout n'est pas dit explicitement, mais on comprend vite les relations et les liens envers tout le monde pour peu qu'on fasse l'effort de comprendre. Et ça, j'aime particulièrement. L'auteur laisse au lecteur la marge de manoeuvre nécessaire pour qu'il soit obligé de réfléchir sans que cela plombe le roman. C'est un grand plus, que j'affectionne particulièrement.

Deuxièmement, il faut avouer que l'auteur a su nous pondre une écriture intense. Que ce soit par son style, par le rythme, ou par l'usage qu'il fait de l'ellipse temporelle, l'auteur nous prend toujours au bon moment tout en sachant couper exactement là où il faut pour que le lecteur n'ai pas le temps de s'ennuyer. Le roman comporte bien des moments d'ombres qui sont appréciables, puisqu'on progresse dans l'histoire  de moments forts en moments forts. De plus, l'attention ne baisse jamais à la lecture puisque la réflexion est toujours présente à l'esprit du lecteur. Ce n'est pas la lecture calme et reposante de la soirée, c'est une lecture prenante et intense qui plonge le lecteur dans son univers.

Et l'univers, parlons-en. Car Dune, c'est avant tout un univers qui est riche, intense, développé et complet. Rien qu'au niveau de l'organisation politique, il reste des bouquins à écrire (et les appendices fournis le sont aussi, fournies). Et rien que ça, ça fait plaisir. On sent derrière le bouquin tout une structure qui est en place et qui densifie le monde. Bien des choses sont évoquées sans même qu'on ne les développe ou qu'on en saisisse tout le sens. Mais en lisant, j'ai compris ce qu'il fallait savoir d'elles pour l'histoire. Et au final, ça passe largement mieux que trois tartines de textes pour chaque chose. Ici, c'est simple et efficace. Mais jamais gratuit. On sent tout le travail de création d'un univers derrière, et cette complexité rend le texte puissant, car il est nourri de tout un univers qu'on ne fait qu'effleurer.

Le seul problème restant, à mon avis, est celui de l'histoire et un peu des personnages aussi. C'est le seul "défaut" que je relèverais à l'oeuvre. Car si tout est bon, il faut bien le dire, l'histoire reste un rien classique dans son développement et ne confère pas spécialement de retournements impressionnants. D'autre part, les personnages sont un peu effacés devant toute l'immensité du monde crée, et même si j'ai apprécié le développement final de Paul, qui me donne envie de lire la suite, je ne les ai pas trouvé extraordinaire. L'histoire se tient, contient d'excellentes choses, mais n'est pas exceptionnelle en soi. Et ça ... C'est dommage, mais en même temps, peut-on demander une histoire dense et fouillée dans un livre qui est déjà tellement plein de nouveauté ? Peut-être, et là-dessus je rejoins ce que je pensais sur Neverwhere, que le fait d'avoir un univers aussi vaste, tellement de choses à apporter, ne demande pas de développer une histoire au potentiel infini. Ce serait apporter trop de choses d'un coup, et je me serais sans doute fait noyer dans la masse. Alors que là, j'ai pu plonger avec délice dans un monde et dans un style.

Maintenant, j'attends la suite au tournant, et je pense que l'auteur peut se permettre de développer d'autres choses bien plus complexes dans les prochains tomes, maintenant que l'univers est posé, ou au moins esquissé. Et ça, mes amis, j'ai envie de le voir !

Je ne parle que très peu de toute la partie réflexion qui est accordé au pouvoir, à la religion, à la condition humaine, et à diverses autres choses tels que le climat, l'écologie, la biologie ou encore les relations humaines. C'est déjà assez vaste à traiter, et cet article est bien assez long. Sans même parler de l'ambiance bien particulière qui combine le désert de sable et la science-fiction, mêle les cultures et les époques. On retrouve un peu de tout, c'en est bluffant.

Pour résumer tout ce pavé, je dirais simplement que Dune est un excellent livre, à qui il manque encore un petit poil pour atteindre le summum de l'art littéraire. Mais le livre seul n'est que le prémisse d'une saga. Et c'est peut-être en elle que se trouve tout la force qui "manque" dans ce tome. Mais ce tome à lui tout seul vous invite dans un univers riche et dense, avec une histoire simple mais efficace, dans un style beau et prenant. Un tel livre ne vous lâchera pas du moment que vous faites l'effort de le lire, et ça c'est la marque de fabrique des grands auteurs. Une saga qui démarre du meilleur pied et que je vais essayer de poursuivre aussitôt que possible. Lisez-là, c'est un livre qui mérite qu'on s'y attarde.

(Chronique n°228)

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