mercredi 27 février 2013

Nous sommes tous mort (Lewis Trondheim & Jean-Luc Coudray)


Là, cette chronique sera particulière pour une BD. Déjà, je vais faire une introduction très courte, pour la présenter, mais ensuite je dois dire quelque chose : je ne mettrais pas d'extrait de l'album. La raison, vous la trouverez un poil plus bas. Je vous présente une des plus belle BD de philosophie :


Résumé en trois mots : Mort, Philosophie et Patate

Voila une BD qui .... en fait elle tient du génie. Et je suis gentil. Cette BD, c'est quelque chose d'unique et d'incroyable. Vraiment ! Vous n'en trouverez pas deux comme celle-là. Et cela tient dans plusieurs points.

Tout d'abord, le format. C'est la collection patte de mouche de l'association. Le tome fait 13.8 cm par 10. En clair il tient dans la paume de la main, en débordant un poil. Vous voyez, c'est très petit. Ensuite, il fait 24 pages seulement. C'est la raison pour laquelle je n'ai pas mis d'image. La ce serait du spoil complet. Enfin, le prix est de 2.85 € ! Là, je pense que personne n'a de bonne excuse pour ne pas l'acheter. En deux ou trois jours, vous l'avez à disposition chez vous. C'est vraiment très peu cher, alors précipitez-vous dessus. Et ne le laissez plus jamais sortir de votre bibliothèque.

Ensuite, le sujet. C'est très simple, très court, très bref. De la philosophie. Dit comme ça, on ne pense pas trop que c'est intéressant. Ah, bande de sales petits lecteurs/lectrices droguées au BD de synthèses ! Vous ne savez pas de quoi vous parler. Cette BD, c'est presque un cours complète de philosophie (et qui rendrait d'ailleurs ceux de vos professeurs diablement plus intéressant). Vous ne pensez pas vraiment que c'est possible, j'en suis certain. Et pourtant, vous n'imaginez pas ce que c'est ! La BD va commencer d'une manière très simple. Un bonhomme en forme de patate avec deux bras et deux jambes est assis par terre. Une pierre se soulève, et un crane apparait -celui sur la couverture. Il lui demande "Bonjour, ça va ?". La patate répond "Non". "Pourquoi ?" demande le crane. La patate de répondre : "J'ai peur de mourir". Et le crane de rétorquer "Absurde !". Voila, vous avez lu la première page. Simple, non ? Et bien c'est le départ d'un dialogue de 24 pages à raisons de 4 cases maximum par cases. L'ensemble du texte tiendrait à mon avis en deux feuilles A4 au maximum. Et encore ...

Tout l'intérêt de la chose, c'est que le crane répliquera au fur et à mesure que la patate parle, trouvant toujours argument et contre-exemple aux doutes et aux interrogations du personnage. On comprend vite que ce personnage lambda est une représentation de n'importe qui et le crane une représentation de la mort. Mais nous avons le droit à des dialogues soignés et très juste. Ça frappe bien, fort et précisément. Rien n'est superflu (en même temps, avec 24 pages ....) et vous aurez une morale très intelligente. En fait tout le propos du livre est intelligent, mais fait bien réfléchir. C'est de la philosophie, mais de la bonne, de la haute philosophie. Après tout, a-t-on besoin vraiment de faire des études et d'écrire des romans de 300 pages pour être philosophe ? Je ne pense pas du tout. Mais là encore, ce n'est que mon avis, et je le partage. Pour moi ce petit texte est un recueil de philosophie au même titre que Le banquet de Platon. Mais je m'égare un poil.

En terme de dessin, nous avons de la très grosse pointure, puisqu'il s'agit non moins que du génial, du terrible, de l'excellent, du sublime Lewis Trondheim ! ..... Je sens que je viens de faire un bide là. Mais si, rappelez-vous ! L'auteur géniale de la bande-dessinée française, précurseur de l'OuBaPo, écrivain prolifique et géniale, précurseur de tant de choses, novateur de la BD, génie des planches, dessinateur fabuleux ! Celui qui à fait Lapinot, Donjon et de tant d'autres merveilles ! Celui qui vous fait des dessins qu'on qualifie d'enfantin mais qui sont d'un niveau inégalés ! Révisez vos classiques enfin !
Enfin bref, je dois dire une chose : ce personnage est une tuerie. Il va nous faire quelque chose de dingue. Si vous lisez la BD, vous avez le sentiment que tout à été bâclé, que c'est du dessin rapide, que rien n'est vraiment réfléchi. Eh oh ! Deux personnes pour pondre une petite BD de 24 pages, c'est pas parce qu'ils sont les deux fainéants ! Surtout pas Trondheim, quoi !
En fait, le dessin est extrêmement travaillé sans qu'on s'en rende compte. Le personnage patatoïde va fuir tout au long du dialogue, poursuivit par une mort qui ne cessera de grossir. Ce sont des détails subtil, mais tout à été prévu. Rien, absolument rien n'a été laissé au hasard. Le choix du décor, désertique et vide, des scènes, des cadrages, tout est calculé. C'est là qu'on voit le véritable génie de Trondheim, qui va nous faire quelque chose de superbe avec son trait vraiment curieux et sans superbe panache, mais toujours juste et précis. On ne dirait pas, mais Trondheim est un génie de la composition, des cadrages, de tout en fait. Je vous recommande ses autres lectures, que je vous détaillerais dans d'autres chroniques plus tard.

En résumé, nous avons une BD qui est certes très courte, mais parfaitement bien faite, d'un bout à l'autre, au dessin travaillé et sans hasard, aux dialogues percutant et à la philosophie intelligente. Elle s'offre très très facilement, rentre dans la poche, et en plus est quasiment donnée au niveau du prix. Pour une telle somme, c'est vraiment le summum de ce qu'on pourrait attendre. Je pense que c'est également une des meilleurs BD de philosophie, qui ne cherche pas à s'étendre, et surtout surprend dans son propos. Un mus-have dans son genre, qui vaut son pesant de gros sel. A lire, à acheter, à faire découvrir. Plongez les yeux fermés.

(Chronique n°18)

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