lundi 11 février 2013

Papillon (Henri Charrière)

Rah, je sais pourtant bien que je dois conserver quelques articles d'avances. L'idéal serait d'en faire trois ou quatre le week-end et de les poster durant la semaine. Là j'en ai uniquement deux en réserve, et je ne peux pas encore les poster (l'un est de Stephen King, du coup j'attends la chronique n° 13 pour la mettre) et je n'ai toujours pas de chronique BD en avance. C'est très énervant. Donc pour m'aérer l'esprit des lumières qui dissertent contre le curé (oui, un exposé est en préparation pour mercredi) je vous propose une petite chronique qui va nous aérer l'esprit. C'est bon, vous êtes bien attaché ? Alors allons-y ! Dépaysement total, allons voyager dans le temps et l'espace. Cap sur l'île du diable, sur Cayenne et les îles du salut, et le début du siècle !


Résumé en trois mots : Bagne, Cavale et Aventures

Ah, ce genre de livre, ça fait remonter des souvenirs ... Une belle époque, où je découvrais innocent la collection de livres de mes parents. Une époque superbe. L'époque où insouciant et gaiement on se jetait sur les pavés de 691 pages et qu'on le finissait en deux jours. Aujourd'hui ce serait fait dans la journée ... Alalal, la lenteur de ces jeunes ...

Papillon fut un énorme succès, en France et ailleurs, mon exemplaire de 1976 titrant "7 millions d'exemplaires vendus dans le monde". C'est un succès modeste à l'heure actuelle, mais un énorme succès pour l'époque. Et pourtant, aujourd'hui il est très peu connu, beaucoup moins en tout cas que le film qui en a été tiré, ce qui est encore une fois partiellement stupide, mais bon ... En tout cas, plongeons-nous dans cette aventure qui va vous faire virevolter et tournoyer à une vitesse incroyable!

Alors cette fois-ci, pas de présentation de l'auteur, car il est lié à l’œuvre de façon presque autobiographique. Je vais expliquer le tout :

Le livre présent Henri Charrière, en 1931, alors qu'il est arrêté et condamné pour un crime dont il se déclare innocent (mais pour lequel il n'apporte aucune preuve). C'était un petit délinquant, accusé d'un meurtre, qui à déjà été condamné plusieurs fois, et il est envoyé dans ce qui se fait de pire au monde : Cayenne. Le récit commence donc dès la sortie du procès et va raconter la façon dont Henri Charrière va vivre ses années au bagne, condamné à perpétuité et tentant systématiquement de s'évader. Treize ans durant, il errera sur le chemin de la pourriture (c'est l'appellation du bagne). Mais comment cela s'organise-t-il ?

Et bien en fait, vous le saurez en lisant ce livre, où le personnage va se démener comme un beau diable pour tenter par tout moyen de s'évader de la prison, se faisant ami et ennemi, rattrapé, condamné à la Royale (une prison dans la prison pour punir les personnes coupables de crimes au bagne, et qui tuait très fortement les gens). Mais également, vous aurez un détail de la vie au bagne, du fonctionnement entre prisonnier, entre gourbi (grosso modo clan/groupe de bagnards), matons (gardien) et michetons, porte-clefs, surin (couteau) et autres joyeuseté d'une vie trépidante. La jungle, les indiens, les perles, les espagnols et bien d'autres choses en dehors du bagne, lorsqu'on s'est évadé. Car oui, s'évader, franchir le mur, c'est bien beau. Mais ensuite ? Car il faut trouver un pays d'accueil, retravailler, trouver une famille, refaire sa vie. Sa dernière cavale est à la page 559. Vous remarquerez qu'il doit encore faire 130 pages avant d'avoir une situation stable. En clair, c'est long !

Et pourtant, on ne s'ennuie pas une seule seconde. Il y a plusieurs raisons à cela, déjà parce que le style d'écriture est vraiment taillé pour l'aventure qui est contée : vif, direct, très rapide, tourné de belle manière, il est exactement adapté au style de l'aventure tel que le récit ici. Car oui, le récit est une aventure de A à Z. Si c'était un film, ce serait Indiana Jones, une BD, ça serait Corto Maltesse : rebondissement, aventures en tout genre, paysages inconnus, lieux variés, rencontres incroyables ... Tout est millimétré pour que la lecture soit fluide. Des passages plus calme son disséminés, avec des passages plus prenants, de l'aventure réelle, et le tout est fluide et homogène. Tout semble s'enchainer parfaitement logiquement.

Enfin, dernière qualité et non des moindres : le contenu du récit. Car vous allez apprendre de nombreuses choses, outre le fonctionnement du bagne. Ainsi nous verrons la situation géopolitique de l'Amérique du Sud, la façon de naviguer, la réception des événements d'Europe dans ces endroits là, ainsi que beaucoup de petites choses toujours intéressantes. Une vraie mine pour quelqu'un de curieux.
Le récit est coupé en cahier, apparemment il aurait rédigé le tout sur des cahiers scolaires. Le découpage me semble cependant trop beau pour être vrai, et je soupçonne plutôt une redécoupe ensuite, mais bon. Ce n'est pas le principal.

Passons dès à présent aux critiques. Car ce roman peut être bien critiqué !

Déjà, sur le fond. Car si ce roman semble autobiographique, il ne l'est pas. Enfin, pas totalement. En fait, Henri Charrière n'a pas vécu tout ce qu'il raconte, et s'accapare des récits d'autres bagnards (qu'il a côtoyé) et les mêles au sien. Cependant, il faut souligner que c'est fait de façon si habile que vous ne le sauriez pas si personne ne vous le disait. C'est remarquablement bien fait dans le genre, et sacrément efficace. Je n'ai su ça que des années après et j'ai été franchement surpris.
Ensuite, il faut aussi noter que Papillon à tendance à se présenter comme un modèle du genre : droit, noble, vertueux, sans tache, plein d'honneur etc ... Petit rappel : c'est un truand de base qui est accusé de crime. Qu'il l'ai commis ou non, il était déjà truand avant. Ensuite, la façon de présenter les choses est sacrément biaisée : les gentils, c'est les taulards, les méchants bien souvent les gaffes (gardes). Et puis Papillon arrive à parler avec tout le monde, s'entend bien avec tout le monde, calme le jeu entre gens, est bien considéré, se dresse presque en chef des bagnards ... Là encore, c'est très orienté comme vision, et je pense clairement que c'est assez faux. Mais comment s'en assurer ? En fait le mieux serait de lire la biographie de l'écrivain qu'il a fait plus tard, une vraie cette fois-ci, avec la vérité (bon, je suis en Histoire, je ne crois pas que la vérité existe, NDE). Mais si vous le lisez, faites attention, l'auteur vous incline à une certaine vision, et c'est très franchement visible.

Cependant, Papillon reste avant tout un excellent divertissement, remarquablement bien écrit, avec une aventure palpitante, pleine de rebondissements, qui vont vous enchanter pendant des heures de lectures, également vous révolter contre le système carcérale, et pas que français. Il faut bien garder à l'esprit que l'auteur est loin d'être neutre dans ses propos, mais il sait mener son spectateur, et le tout est un excellent spectacle. Aussi bon qu'un grand film de divertissement. Et en plus, vous apprendrez beaucoup de choses, ce qui est toujours très sympathique. Dernier point intéressant : le prix, puisque vous le trouvez en format de poche. C'est donc une excellente lecture, très fluide et très simple, qui ravira pour un bon temps le lecteur.

(Chronique n°11)

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